mercredi 1 juillet 2020

Critique : Esther Benbassa (dir.) - Violences sexistes et sexuelles en politique (2018)

L'homme est un animal politique, un singe qui aime faire le malin, surtout dans les pays latins. Nous sommes probablement également ce que les éthologues appellent une espèce tournoi, surtout dans l'arène politique. On aime se battre et monter à la tribune, alors forcément il y a des combats de coq et même des concours de bite. Mais il ne faudrait pas confondre culture virile et viol. Je ne crois pas qu'il y ait une "culture du viol" à l'assemblée nationale par exemple. On a sans doute plutôt à faire à de vieux pervers libidineux. La première réponse appropriée me semble être d'apprendre à se défendre. Verbalement tout d'abord car c'est primordial d'avoir de la répartie. Ainsi quand un collègue dit à une des autrices : “Petite, tu as un cul qui attire la main”, elle lui répond aussi sec : “Toi, c’est ta gueule qui attire la main”. Et comme ça c'est lui qui perd la face, pas elle. On pourrait aussi apprendre quelques principes de self défense. Simplement être vigilant, ne pas boire trop d'alcool et essayer de garder un peu ses distances (pas évident dans un monde politique si tactile). Cela vaut pour tout le monde, en toutes circonstances. On n'est jamais à l'abri d'une agression. Mieux vaut prévenir que guérir. Et apprendre à se défendre plutôt que de compter sur une hypothétique défense légale.


Le problème c'est que si la justice ne peut pas faire son travail, par manque de preuves principalement, alors la justice médiatique et la vindicte populaire prendront sa place. La boîte de pandore de la suspicion, de la dénonciation et de la calomnie s'ouvrira. Nous pourrions assister à un véritablement déferlement, une vague féminhystérique qu'il conviendrait de canaliser plutôt que d'encourager. Une des autrices préconise que : "lorsqu’une personne politique est accusée de harcèlement, soit elle démissionne, soit elle se met en retrait, sans qu’il y ait besoin d’insister ou de tergiverser." Je trouve qu'il y a là, au mieux, un inquiétant principe de précaution. Au pire, une justice préventive, un glissement dangereux de la présomption d'innocence à la présomption de culpabilité. Dangereux et inutile, car s'il fallait autrefois, tenir son rang, sa parole ou son silence, aujourd'hui on ne tient plus en place. Il fallait se tenir, il faut se lâcher. Nous sommes passés du refoulement au défoulement.


En faisant régner la peur de la dénonciation, certaines féministes voudraient remplacer l'omerta (le silence des victimes) par l'(auto)censure (interdire la drague lourde). C'est de bonne guerre me direz-vous. Cette propagande idéologique commence avec ce slogan : "le privé est politique". Personnellement, je pense qu'il ne faut pas tout dévoiler, médiatiser, politiser. Certaines choses doivent pouvoir rester privé, comme des pratiques ou des mots échangés librement entre adultes consentants, responsables et parés à toute éventualité. Il n'est pas judicieux de tout judiciariser, remplacer l'envie de pénis par l'envie de pénal, la bataille des sexes par la bataille juridique. Sinon la guerre des sexes qui était une guerre froide, deviendra une guerre ouverte.


Qui dit guerre dit victime, et être une victime donne droit à l'empathie ainsi qu'à des réparations. Je peux donc comprendre l'attrait immédiat de cette position, mais ce n'est pas vivable sur la durée. Certes la vie est une jungle, avec des proies et des prédateurs. Mais c'est justement pour ça qu'il faut se battre, se préparer à ces situations à risque, et ainsi peut-être éviter de se faire (sur)prendre. J'ai trop de respect pour le combat féministe pour me réjouir de le voir devenir une course au statut de victime.